Intelligent et lucide, Philippe Croizant est aussi un écrivain à la mode ; il vit d'habiletés et de confessions adroitement ménagées, qui masquent un énorme ennui et un dégo-t de soi réel. Un jour, il décide de se dépasser, et écrit une oeuvre ésotérique, qui tient autant de l'éblouissement que du canular. Il la publie sous un pseudonyme. Désormais il a deux carrières : l'une flatteuse et superficielle, l'autre rare et comme clandestine. Il n'en continue pas moins de vivre en Parisien gâté.
Le verbe se vengera cruellement... À Belgrade vit un jeune écrivain " engagé ", Ranko Babitch, pour qui la littérature est une arme. C'est un homme entier et violent. Déçu par le parti, il se révolte. Il découvre alors le livre ésotérique de Philippe Croizant ; à son contact il se met à vénérer le doute, le néant, tous les venins d'une pensée occidentale décadente. Il s'" engage " à fond dans ce qu'il détestait naguère, et trouve sa vérité profonde là où Philippe Croizant, par désoeuvrement, joue à se leurrer. Ranko Babitch finit par se pendre, persuadé qu'il a fait fausse route en obéissant aux directives idéologiques, et assuré que toute son oeuvre n'est qu'erreur et fausseté.
Lorsque Croizant apprend le drame, il se dit qu'il lui faudrait être à la hauteur de cette aubaine : avoir provoqué la mort d'un écrivain, car la mort, comme les autres tragédies, est pour lui matière à vaudeville. S'il souffre, c'est de ne pas souffrir. Et dans la panoplie des pirouettes, il ne ressent même plus cette souffrance en creux.
Sur ce thème peu commun, Alain Bosquet a écrit un roman satirique impitoyable, dont les résonances sont sans fin. Aux problèmes que pose l'écriture - problèmes si généraux qu'ils concernent bien autre chose que l'écrivain, bien plus que les écrivains : toutes les activités des hommes et les hommes eux-mêmes - le romancier fournit des réponses complexes, déroutantes et peut-être même contradictoires. Alain Bosquet, avec virtuosité et profondeur, s'interroge et nous interroge. On rira beaucoup, mais le rire, souvent, sera crispé.
Le verbe se vengera cruellement... À Belgrade vit un jeune écrivain " engagé ", Ranko Babitch, pour qui la littérature est une arme. C'est un homme entier et violent. Déçu par le parti, il se révolte. Il découvre alors le livre ésotérique de Philippe Croizant ; à son contact il se met à vénérer le doute, le néant, tous les venins d'une pensée occidentale décadente. Il s'" engage " à fond dans ce qu'il détestait naguère, et trouve sa vérité profonde là où Philippe Croizant, par désoeuvrement, joue à se leurrer. Ranko Babitch finit par se pendre, persuadé qu'il a fait fausse route en obéissant aux directives idéologiques, et assuré que toute son oeuvre n'est qu'erreur et fausseté.
Lorsque Croizant apprend le drame, il se dit qu'il lui faudrait être à la hauteur de cette aubaine : avoir provoqué la mort d'un écrivain, car la mort, comme les autres tragédies, est pour lui matière à vaudeville. S'il souffre, c'est de ne pas souffrir. Et dans la panoplie des pirouettes, il ne ressent même plus cette souffrance en creux.
Sur ce thème peu commun, Alain Bosquet a écrit un roman satirique impitoyable, dont les résonances sont sans fin. Aux problèmes que pose l'écriture - problèmes si généraux qu'ils concernent bien autre chose que l'écrivain, bien plus que les écrivains : toutes les activités des hommes et les hommes eux-mêmes - le romancier fournit des réponses complexes, déroutantes et peut-être même contradictoires. Alain Bosquet, avec virtuosité et profondeur, s'interroge et nous interroge. On rira beaucoup, mais le rire, souvent, sera crispé.