C'est un livre politique autant qu'une introspection. Une lettre à l'absent vaincu autant qu'une analyse de sa défaite. Un témoignage pour soi-même et pour les autres. Un affrontement enfin avec l'inexplicable : la défaite de Lionel Jospin, et le passage aux oubliettes de la gauche plurielle, après cinq ans de gouvernement honorable. De tous ses ministres, nul ne fut plus proche de Lionel Jospin que Pierre Moscovici - le « petit frère » du patron de la gauche, élève en rationalité politique, mais aussi ami, observateur, frémissant d'attention et d'affect contenu... La défaite de Jospin fut aussi la sienne, la fin d'une première vie politique entamée en 1984 aux côtés de celui qui n'était alors que le premier secrétaire du P.S. Ayant hésité sur son avenir, ayant choisi de continuer la politique, « Mosco » s'arrête, le temps d'un livre, et essaie d'être juste et vrai à la fois. Rejetant le simplisme et la nostalgie, évitant la complaisance et l'auto-plaidoyer, il revisite les années-Jospin, raconte le lent passage de la dignité retrouvée de la gauche à l'enfermement dans la satisfaction gouvernementale ; la transformation d'une dynamique politique en un enlisement condamné à l'échec ; l'erreur stratégique du retournement du calendrier ; les timidités de « l'homme qui ne voulait pas être président », le traumatisme de Lionel Jospin, combattant pudique et orgueilleux dévoilé par ses biographes, redoutant alors que le regard que portaient sur lui les Français ait irrémédiablement changé. Il revient aussi sur la lente tragédie de la gauche, ayant perdu l'audace sans même s'en rendre compte, Jospin, n'ayant su rester jospiniste, a fini par perdre, et la gauche avec lui. Et Moscovici, poursuivant l'histoire de la gauche, combattant pied à pied ce qu'il appelle les simplismes de l'heure (virages à gauches, modernismes ostentatoires, destruction de l'idole) affirme sa dignité en restant fidèle, revendique les mêmes principes pour, à son tour, hériter de l'avenir, ou réinventer le possible.