Mutations ou crises, les brusques accès de fièvre idéologique de notre temps masquent et en même temps expriment de profonds et silencieux déplacements dans le savoir, comparables aux révolutions qui au XVIIIe et à la fin du XIXe siècle ont fait éclater les sciences exactes. Ce livre entend donner un bilan détaillé des enjeux de la révolution structuraliste par laquelle les sciences humaines changent de code, abandonnant un humanisme obsessionnel et vide au profit de nouveaux objets ; signes, métaphores, structures. Il offre une pédagogie du structuralisme, une carte qui aide à se reconnaître dans les recherches et la philosophie contemporaines. Contre les calomnies et les désaveux dont le structuralisme est trop souvent l'objet : positivisme, dessèchement de la pensée, complicité avec les technocraties, il annonce l'avènement d'une poétique nouvelle, d'une joie du symbolique et du rhétorique renouant avec le baroque et la musique de Bach et de Leibniz. Refusant les dogmatismes théistes ou les mysticismes du Corps, la poétique structurale est une libération idéologique militant contre les totalitarismes, les goulags philosophiques et politiques ; à l'écoute d'Héraclite, de Kant et de Hölderlin, poétique de la différence, elle inaugure un espace de pensée et un désir de savoir plus riches et plus rebelles que ce que l'on nommait la dialectique : mythes lus par l'anthropologie de Lévi-Strauss, inconscient freudien et lacanien, voici que l'hétérogène, une pensée de l'Autre nous fait face et vient défier par sa dépense et le jeu de sa négativité la triste positivité de notre réserve.