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« Je ne sais plus chez quel romancier russe j'ai lu que le monde est peuplé de velléitaires tourmentés par leurs illusions » : Jean-Simon Blaize et Cora Eden, les deux narrateurs principaux, sont de ceux-là. Le premier, comédien raté, asthmatique comme Jouvet, mais frivole et paresseux, célèbre à l'orée du roman ses quarante ans et sa retraite loin de la capitale, dans une bastide cévenole. A la fête qu'il organise surgit Cora Eden, qu'il connut à ses débuts sur scène : comme lui, mais plus tôt, Cora a renoncé à sa carrière de comédienne. Ce soir-là, Cora et Jean-Simon, dont la relation se teinte d'un mépris réciproque, se découvrent une attache commune : Georgio Vilanovitch, metteur en scène et dramaturge tyrannique, dont les créations oscillent entre sordide et féérie ; Georgio, grand solitaire, « aux yeux verts qui ne vous laissent pas tranquilles ». Jean-Simon et Georgio sont amis depuis le lycée ; au fil des années, le premier a pu suivre, non sans quelque amertume, le succès grandissant du second. Cora est devenue l'assistante du metteur en scène : à défaut de jouer sous sa direction, factotum résignée, elle a su se rendre indispensable. Pour l'un et pour l'autre, Georgio est le miroir inversé et cruel d'une existence médiocre. Quant à Gladius, le clown mélancolique et depuis peu l'amant de Cora, il n'a pas su voir, vingt ans auparavant, que le jeune Georgio qui le conduisait alors au succès, lui prenait aussi sa femme... Georgio meurt prématurément, fauché par une auto sur un boulevard parisien. Il laisse à Jean-Simon et à Cora une confession inachevée, comme un dernier coup de théâtre, levant le voile sur le ressort énigmatique de son existence, celle d'un être plein d'orgueil, « tout sauf un ange », né de père inconnu, mu par le seul désir d'échapper au destin misérable de sa propre mère battant le pavé le soir pour vendre, contre quelques pièces, des fleurs à l'unité. Reprenant la plume qu'il leur tend au-delà de la mort, Cora et Jean-Simon, en alternance, comme s'ils se donnaient la réplique, racontent : à leur tour ils mettent à nu leur propre existence, sous les feux de la rampe d'une relation triangulaire désormais sans fard. C'est l'histoire que nous lisons, orchestrée par les mots de l 'ami disparu, dont la confession, récit gigogne inséré à la fin du roman, fournit la clé : « ne pas sourire dans la défaite ».