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Nos têtes sont plus dures que les murs des prisons

Thierry Lévy

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A l'égard de la très grande majorité des criminels et des délinquants, la prison a perdu sa raison d'être. Des solutions de rechange plus performantes et plus humaines (moyens modernes de surveillance à distance, biométrie, surveillance électronique, vidéosurveillance) existent. Notre raison en convient mais quelque chose de très profond et de très inavouable, à l'intérieur de chacun d'entre nous, renâcle... Nous ne pourrons envisager de substituer la surveillance à distance à la réclusion de longue durée qu'après avoir purgé nos cerveaux de l'utopie carcérale selon laquelle le coupable trouve dans l'isolement et la privation de liberté, à travers les épreuves d'une souffrance méritée, la force de se régénérer. Or cette utopie renoue avec une conception de l'enfermement antérieure à la réforme pénitentiaire du XVIIIème siècle, qui avait précisément consisté à faire échapper le condamné à la destruction physique ainsi qu'à la cruauté des sévices. La prison était à l'époque parvenue à se faire accepter à la place des mille douleurs réclamées par le désir de vengeance de la société. Si la prison résiste aujourd'hui au changement, ce n'est pas à sa rationalité qu'elle le doit, mais à sa symbolique. Ce sont ses échecs qui la maintiennent, non ses succès. Elle échoue dans l'objectif de réinsertion qu'elle proclame, elle réussit à étancher la passion vengeresse et à infliger une cruauté qu'elle camoufle.